L’entrée en vigueur, le 1er juillet 2006, du code général de la propriété des personnes publiques n’a pu, par elle-même, avoir pour effet le déclassement de dépendances qui appartenaient antérieurement au domaine public et qui ne rempliraient plus les conditions désormais fixées, depuis le 1er juillet 2006, par son article L. 2111-1.

T. confl., Ministre de la justice c/ EARL Finucchiola 11 mai 2020, n° C4181.

Texte intégral
Vu, enregistrée à son secrétariat le 8 novembre 2019, l’expédition de l’arrêt du 4 novembre 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille, saisie d’un appel du garde des sceaux, ministre de la justice, contre le jugement du 15 février 2018 par lequel le tribunal administratif a condamné l’Etat à verser la somme de 57 566 euros à l’EARL Finucchiola en réparation des préjudices subis du fait de l’accroissement au cours des années 2014, 2015 et 2016 des dégâts causés à ses cultures agricoles par des sangliers provenant des dépendances du site pénitentiaire de Casabianda (commune d’Aléria), a renvoyé au Tribunal, par application de l’article 35 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 9 janvier 2020, le mémoire produit par le garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à ce que la juridiction judiciaire soit déclarée compétente, par les motifs que les sangliers qui ravagent les cultures proviennent d’espaces naturels qui ne relèvent pas effectivement de la gestion de l’Etat et qui ne relèvent pas du domaine public ;

Vu, enregistré le 8 janvier 2020, le mémoire produit par l’EARL Finucchiola, tendant à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente, par les motifs que le juge administratif est compétent pour connaître d’un litige portant sur la réparation des préjudices causés par le gros gibier provenant d’une dépendance du domaine public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme B… A…, membre du Tribunal,

— les observations de la SCP Zribi, Texier pour l’EARL Finucchiola ;

— les conclusions de M. Hubert Liffran, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. L’EARL Finucchiola a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner l’Etat à lui verser des indemnités en réparation des dommages causés à ses cultures au cours des années 2014, 2015 et 2016 par des sangliers provenant du centre pénitentiaire ouvert de Casabianda situé sur le territoire de la commune d’Aléria (Haute-Corse). Ce centre occupe un site d’environ 1400 hectares, composé de bâtiments, d’une exploitation agricole et d’une zone de forêts et de maquis. Par un jugement du 15 février 2018, le tribunal administratif de Bastia a condamné l’Etat à verser à l’EARL la somme de 57 566 euros en réparation de ses divers préjudices. Saisie d’un appel contre ce jugement par la garde des sceaux, ministre de la justice, la cour administrative d’appel de Marseille a, par un arrêt du 4 novembre 2019, renvoyé au Tribunal des conflits, sur le fondement de l’article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence.

2. Avant l’entrée en vigueur, le 1er juillet 2006, du code général de la propriété des personnes publiques, l’appartenance d’un bien au domaine public était, sauf si ce bien était directement affecté à l’usage du public, subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné. En l’absence de toute disposition en ce sens, l’entrée en vigueur de ce code n’a pu, par elle-même, avoir pour effet le déclassement de dépendances qui appartenaient antérieurement au domaine public et qui ne rempliraient plus les conditions désormais fixées, depuis le 1er juillet 2006, par son article L. 2111-1.

3. Le centre pénitentiaire ouvert de Casabianda appartient à l’Etat, a été affecté au ministère de la justice depuis l’année 1948 et en dernier lieu par une convention du 21 janvier 2015 pour les besoins du service public pénitentiaire et a fait l’objet d’aménagements spéciaux. Il appartenait donc au domaine public de l’Etat dont le ministère de la justice a la charge avant l’entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques. En l’absence de tout acte de déclassement, il en est encore ainsi à la date des désordres constatés.

4. Il résulte de ce qui précède que le litige qui oppose l’EARL Finucchiola à l’Etat relève de la compétence de la juridiction administrative.

D E C I D E :

————–

Article 1er : La juridiction administrative est compétente pour connaître du litige opposant l’EARL Finucchiola à l’Etat.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l’EARL Finucchiola et à la garde des sceaux, ministre de la justice.

Compétence du juge administratif en cas d’action en responsabilité sans faute contre le maître d’un ouvrage public par un assureur subrogé conventionnellement dans les droits d’autres assureurs eux-mêmes subrogés dans les droits de tiers à l’ouvrage public.

T. confl., Société SA Allianz France IARD c/ Gaz Réseau Distribution France 9 mars 2020, n° C4179, Lebon T.

Cf., sur le principe selon lequel l’ordre de juridiction compétent est celui dont relèverait une action engagée par le subrogeant, y compris en cas de subrogation conventionnelle, TC, 19 février 1996, M. Coda, n° 2972, p. 533. Rappr., sur le même principe, CE, 31 mai 1974, Sieurs Cheilan et Tissandier, n° 90876, T. pp. 902-918.

Texte intégral
Vu, enregistrée à son secrétariat le 5 novembre 2019, l’expédition du jugement du même jour par lequel le tribunal administratif de Poitiers, statuant sur la demande de la société Allianz France IARD tendant à la condamnation de Gaz Réseau Distribution France (GRDF) à lui verser la somme de 1 800 010, 41 euros assortie des intérêts légaux en remboursement des indemnités versées aux assureurs qui ont indemnisé les tiers victimes de dommages imputables à l’explosion de gaz survenue le 22 février 2011 à Saint-Jean-d’Angély, a renvoyé au Tribunal, par application de l’article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu, enregistré le 23 janvier 2020, le mémoire par lequel la société GRDF conclut à ce que la juridiction administrative soit déclarée compétente pour connaître de l’action de la société Allianz France IARD à son encontre au titre des dommages subis par des tiers ;

Vu, enregistré le 27 janvier 2020, le mémoire par lequel la société Allianz IARD conclut à ce que la compétence de la juridiction administrative soit déclarée compétente pour connaître du litige ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à la commune de Saint-Jean-d’Angély, à la société AXA Corporate Solutions Assurances, à la société Mutuelle d’Assurances des Collectivités Locales, à la société Berthouin Potrel Energie, à la société AVIVA Assurances et au ministre de la transition écologique et solidaire, qui n’ont pas produit de mémoire ;

Vu les autres pièces du dossier,

Vu la loi des 1-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 mai 1872 ;

Vu le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. A… C… , membre du Tribunal,

– les observations de la SCP Thouvenin, Coudray, Grévy pour Gaz réseau Distribution France,

– les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix pour la société Allianz France IARD,

– les conclusions de M. Hubert Liffran, rapporteur public ;

Considérant que, le 22 février 2011, une explosion de gaz a détruit l’habitation des époux B… et endommagé une cinquantaine de maisons situées à proximité, causant la mort de trois personnes, dont celle des époux B… ; que la société Allianz France IARD, assureur des époux B…, a saisi le tribunal de grande instance de Saintes d’une action indemnitaire à l’encontre de Gaz Réseau Distribution Réseau (GRDF) en qualité d’assureur subrogé légalement dans les droits des époux B…, usagers du service public industriel et commercial de distribution de gaz ; que la société Allianz France IARD a, par ailleurs, remboursé aux assureurs des tiers à l’ouvrage public les sommes qu’ils leur avaient versées au titre des dommages subis à raison de l’explosion de gaz ; que la société Allianz France IARD, subrogé par convention dans les droits de ces assureurs, a saisi le tribunal administratif de Poitiers de conclusions tendant à ce que GRDF lui rembourse les sommes ainsi versées sur le fondement de sa responsabilité sans faute à l’égard des tiers à l’ouvrage public constitué par le réseau de distribution de gaz ; que, par un jugement du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a renvoyé au Tribunal, par application de l’article 35 du décret du 27 février 2015, le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant que la société Allianz France IARD agit en qualité de subrogée conventionnellement dans les droits des assureurs, eux-mêmes subrogés légalement dans les droits de leurs assurés, qu’ils ont indemnisés des dommages causés par l’explosion de gaz ; que la demande présentée par la société Allianz France IARD tend à l’engagement de la responsabilité de GRDF, maitre de l’ouvrage public, sur le terrain de sa responsabilité sans faute à l’égard des tiers à cet ouvrage ; qu’une telle action, alors même que la subrogation était de nature conventionnelle, relève de la compétence de la juridiction administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La juridiction administrative est compétente pour connaître du litige opposant la société Allianz France IARD, en qualité de subrogée dans les droits des assureurs des tiers, à Gaz Réseau Distribution France.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Allianz France IARD, à Gaz Réseau Distribution France, à la commune de Saint-Jean-d’Angély, à la société AXA Corporate Solutions Assurances, à la société Mutuelle d’Assurances des Collectivités Locales, à la société Berthouin Potrel Energie, à la société AVIVA Assurances et au ministre de la transition écologique et solidaire