Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 14/10/2021, 444469, Inédit au recueil Lebon

Texte Intégral :
Vu la procédure suivante :

M. D… B… a demandé à la Cour nationale du droit d’asile d’annuler la décision du 11 janvier 2019 par laquelle le directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d’asile, et de lui reconnaitre la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision n° 19020448 du 15 juillet 2020, la Cour nationale du droit d’asile a annulé cette décision, accordé le bénéfice de la protection subsidiaire à M. B… et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 septembre et 15 décembre 2020, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’OFPRA demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l’affaire devant la Cour nationale du droit d’asile.

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
– la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967 ;
– la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;
– la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
– le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d’Etat,

– les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d’asile que M. D… B…, de nationalité syrienne, a présenté une demande d’asile, qui a été rejetée comme irrecevable par une décision du 11 janvier 2019 de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), au motif qu’il bénéficiait déjà d’une protection effective au titre de la protection subsidiaire accordée par l’Espagne, Etat membre de l’Union européenne. La Cour nationale du droit d’asile a annulé cette décision et accordé le bénéfice de la protection subsidiaire à M. B…, par une décision du 15 juillet 2020 contre laquelle l’OFPRA se pourvoit en cassation.

2. Aux termes de l’article L. 723-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile applicable au présent litige :  » L’office peut prendre une décision d’irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d’octroi de l’asile sont réunies, dans les cas suivants: / 1° Lorsque le demandeur bénéficie d’une protection effective au titre de l’asile dans un État membre de l’Union européenne; / (…) « . Si la Cour nationale du droit d’asile a relevé, dans les motifs de sa décision par lesquels elle rappelait la teneur de l’argumentation de M. B…, que ce dernier soutenait s’être désisté de la demande qu’il avait présentée aux autorités espagnoles lors de son passage dans cet Etat, elle ne s’est pas prononcée sur le bien-fondé du motif de la décision d’irrecevabilité de l’OFPRA attaquée devant elle et tiré de ce que l’intéressé bénéficiait de la protection subsidiaire en Espagne. En accordant à ce dernier le bénéfice de la protection subsidiaire sans avoir préalablement constaté qu’il ne bénéficiait pas de cette protection en Espagne ou que cette dernière n’était pas effective, la Cour a entaché sa décision d’erreur de droit.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, l’OFPRA est fondé à demander l’annulation de la décision qu’il attaque.

D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 15 juillet 2020 de la Cour nationale du droit d’asile est annulée.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d’asile.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. D… B….

Délibéré à l’issue de la séance du 22 septembre 2021 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, présidents de chambre, Mme H… C…, M. I… E…, M. G… A…, Mme Isabelle Lemesle, conseillers d’Etat et M. Bruno Delsol, conseiller d’Etat-rapporteur.
Rendu le 14 octobre 2021.
Le président :
Signé : M. Christophe Chantepy
Le rapporteur :
Signé : M. Bruno Delsol
La secrétaire :
Signé : Mme F… J…

ECLI:FR:CECHR:2021:444469.20211014